Comprendre et intégrer l’économie circulaire

Pour de nombreux habitants des économies développées, trier les déchets ménagers, réutiliser les sacs de courses et privilégier les choix de consommation plus « respectueux de l’environnement » conduit facilement à croire qu’en tant que société, nous faisons une grande différence pour mener notre planète vers un avenir durable.
Mais la réalité a une capacité imparable à briser de telles illusions en un instant. Il s’avère que même aujourd’hui, alors que le public est fortement sensibilisé au réchauffement climatique et que le concept « réduire, réutiliser, recycler » est sur toutes les lèvres, nous jetons collectivement environ 80 % du contenu matériel de tous nos produits de grande consommation[1]. Cela se traduit littéralement par des montagnes de ressources précieuses gaspillées de manière inconsidérée : incinérées dans l’atmosphère ; laissées à l’abandon en monticules pourris ou enterrées en guise d’héritage empoisonné pour les générations futures.
Ce n’est pas que le matériel en question n’a pas de valeur. Traditionnellement, quelque 2 600 milliards USD de produits sont jetés chaque année et ne sont jamais réutilisés. Même pour les réfractaires aux programmes écologiques, cela représente 2 600 milliards de raisons financières de modifier notre comportement face au gaspillage.
Il existe, bien sûr, un moyen beaucoup plus durable de gérer notre économie. Il s’agit du principe connu sous le nom de « circularité », un concept de fabrication et de consommation qui implique le partage, la réparation, la remise à neuf et le recyclage des matériaux et des produits aussi longtemps que possible, afin de garantir une valeur environnementale maximale pour chaque article produit.
Que gaspillons-nous et en quelle quantité ?
Dans l’économie circulaire, les produits ne sont pas simplement utilisés et immédiatement considérés comme obsolètes. Au lieu de cela, ils sont soit réemployés (et encore et encore…), soit transformés en quelque chose d’autre d’une valeur équivalente pour la société. En d’autres termes, la durée de vie du produit est prolongée aussi longtemps que possible sur le plan technique.
Non seulement cette stratégie contribue à réduire la pollution des sols, de l’air et de l’eau – pollution considérée comme indissociable du consumérisme de masse –, mais elle permet également de réduire la demande en ressources neuves des systèmes terrestres pour remplacer celles qui ont été jetées prématurément.
Les quantités en jeu sont vraiment inquiétantes. Les déchets électroniques (comme les téléviseurs, les ordinateurs portables, les smartphones et les électroménagers) sont la catégorie de déchets à la croissance la plus rapide au monde. En 2022, le volume des déchets électroniques s’est élevé à 62 milliards de kilogrammes, soit une quantité suffisante pour remplir 1,55 million de camions à ordures. La demande en produits électroniques grand public ne cessant d’augmenter d’année en année, les déchets électroniques devraient atteindre 82 milliards de kilogrammes par an d’ici 2030[2]. Les déchets électroniques sont particulièrement toxiques, car ils contiennent des métaux lourds et des composés tels que l’arsenic, le plomb, le cadmium, le chlorure de vinyle et les agents ignifuges, tous reconnus pour leurs effets négatifs sur les systèmes respiratoires, reproductifs et immunitaires de l’humain.
Nos problèmes ne se limitent pas aux déchets électroniques. Nous devons également prendre en compte les déchets chimiques industriels. En tant que société, nous produisons environ 400 millions de tonnes de déchets chimiques dangereux chaque année : carburants, batteries traditionnelles, déchets médicaux, solvants, peintures, produits de nettoyage, encres et pesticides[3]. En l’espace d’une seule génération, la quantité de produits chimiques que nous produisons a augmenté de 40 000 %. Aujourd’hui, l’organisme d’un individu moyen contient plus de 700 produits chimiques fabriqués par les humains, dont les effets physiologiques restent pour la plupart inconnus.
Toxiques et très coûteux lorsqu’ils sont traités, les déchets chimiques sont souvent exportés vers des pays en développement où les mesures de protection de l’environnement sont moins rigoureuses pour leur élimination, et où ils pénètrent dans la nappe phréatique ou polluent de précieuses terres agricoles.
Le secteur de la construction produit lui aussi beaucoup de déchets, au point de susciter un certain découragement. Les milliards de tonnes de déchets que nous générons chaque année en construisant, en rénovant ou en démolissant des infrastructures représentent environ 40 % du volume de l’ensemble des décharges[4]. Au lieu de recycler ces déchets pour développer le parc immobilier, nous choisissons d’extraire de la Terre quelque 100 milliards de tonnes de nouvelles matières premières chaque année, ce qui n’est clairement pas une approche durable[5].
L’avalanche de déchets commerciaux provenant de nos maisons, bureaux, magasins et usines vient s’ajouter au stock de la honte. Le surplus d’emballages, de nourriture, de carton, de papier et de textiles se traduit par plus de 2 milliards de tonnes de déchets commerciaux par an[6]. Nous pourrions également frémir en pensant au sort des navires, dont quelque 70 % sont simplement échoués en attendant d’être démolis à la fin de leur vie utile. Les navires abandonnés laissent souvent échapper de leurs structures rouillées des éléments nocifs comme le zinc et le mercure. Certaines plages du Bangladesh sont aujourd’hui de véritables cimetières de navires, abritant selon les estimations 79 000 tonnes d’amiante, 240 000 tonnes de PCB (des produits chimiques organiques dangereux appelés biphényles polychlorés) et 210 000 tonnes d’autres substances qui appauvrissent la couche d’ozone – sans grand espoir quant à la possibilité d’une solution pérenne.
Pire encore, en raison de l’industrialisation croissante et de l’accélération de la consommation, la production de déchets de la planète devrait augmenter de 70 % d’ici le milieu du siècle, ce qui ne laisse entrevoir aucun répit à l’horizon[7].
Alors, comment faire pour relever ce défi colossal ?
La stratégie circulaire : impératifs financiers et environnementaux
Il existe une lueur d’espoir pour notre monde de plus en plus envahi par les déchets : l’importance de l’incitation financière. La prudence commerciale pourrait devenir le moteur de l’économie circulaire à venir.
Sur les 2 600 milliards USD de déchets que nous jetons chaque année, les matériaux qu’ils contiennent conservent environ 80 % de leur valeur initiale[8]. Que se passerait-il si ces « déchets » n’étaient pas considérés comme étant en fin de vie, mais simplement en transition ?
En 2022, l’économie circulaire mondiale pesait déjà environ 339 milliards USD par an[9], soit plus du double par rapport aux 150 milliards USD enregistrés en 2020.[10] L’intérêt pour ce segment étant croissant, sa valeur devrait encore doubler d’ici 2026[11]. À plus long terme, l’économie circulaire pourrait générer une activité économique mondiale supplémentaire de 4 500 milliards USD d’ici la fin de la décennie, et 25 000 milliards USD d’ici 2050 – un chiffre jugé réaliste.
Selon les experts de McKinsey, rien qu’en Europe, les entreprises de biens de consommation réorientant leurs portefeuilles autour des principes de l’économie circulaire pourraient mettre en place une chaîne de valeur de plus de 500 milliards USD d’ici 2030, et générer un chiffre d’affaires global de 1 000 milliards USD d’ici le milieu du siècle.[12]
Qu’est-ce qui motive ces prédictions extraordinaires ? Sans doute plus que la simple valeur monétaire des matériaux récupérés dans les produits existants. En fait, les entreprises qui adoptent une mentalité circulaire économisent de l’argent en réduisant leur consommation d’énergie, en gagnant un avantage sur leurs compétiteurs et en respectant les critères ESG (environnement, social et gouvernance), ainsi qu’en bénéficiant d’allègements fiscaux de la part de gouvernements progressistes pour venir compléter leurs résultats.
Les préoccupations financières mises à part, il existe une autre raison valable pour laquelle nous devrions nous réjouir de l’élan qui se dessine en faveur de l’économie circulaire : Notre lutte permanente et essentielle contre le changement climatique.
Les chiffres indiquent que nous accumulons en moyenne 11,2 milliards de tonnes de nouveaux déchets chaque année, dont la lente dégradation contribue à hauteur de 5 % aux émissions mondiales de gaz à effet de serre[13]. Les déchets sont également responsables d’un cinquième des émissions mondiales de méthane, un gaz à effet de serre 80 fois plus puissant que le dioxyde de carbone[14].
À l’échelle mondiale, le passage à une économie circulaire pourrait assurer environ 45 % (quelque 22,1 milliards de tonnes de CO2/an) des réductions de gaz à effet de serre nécessaires d’ici le milieu du siècle pour maintenir l’objectif de +1,5 oC au-dessus des niveaux préindustriels fixé par l’Accord de Paris de 2016[15]. En d’autres termes, l’élimination progressive des matériaux superflus au stade de la conception et de la fabrication, la prolongation de la durée d’utilisation des produits et la régénération des terres pour le bien commun pourraient contribuer à nous épargner les pires ravages d’une planète surchauffée.
Outre l’impact quantifiable d’une économie circulaire sur les émissions de GES, d’autres motivations environnementales sont tout aussi prometteuses. Considérer les déchets comme un bien potentiellement de valeur permettra également de réduire la consommation de ressources naturelles inestimables. Cela permettra de minimiser la dégradation des espaces naturels ainsi que la perturbation des habitats et contribuera à freiner la perte de biodiversité.
Avec toutes ces incitations, il est temps de réfléchir à la manière dont l’économie circulaire se traduira dans nos industries et nos systèmes financiers à mesure qu’elle gagnera en maturité.
Principales applications de l’économie circulaire
Les biens de consommation – les objets que nous convoitons, possédons et que nous jetons malheureusement souvent – sont en passe de faire des pas de géant vers la circularité, en augmentant leur longévité et leur capacité à être recyclés.
L’industrie de la mode est actuellement une sorte de paria environnemental, puisqu’elle génère environ 92 millions de tonnes de déchets textiles par an[16]. Cependant, d’ici 2030, nous pouvons nous attendre à une multiplication par dix de la quantité de vêtements recyclés, le marché de la « seconde main » étant susceptible de dépasser les ventes du « neuf » à cette date[17]. Moins de vêtements neufs signifie également moins d’eau pour la production et moins de pollution due aux colorants dans nos rivières et nos cours d’eau.
L’industrie de l’électronique est également prête à subir un coup de fouet qui n’a que trop tardé. D’ici 2030, le marché des petits appareils électroniques remis à neuf, tels que les ordinateurs portables et les smartphones, représentera plusieurs milliards de dollars, tandis que les gros appareils électroménagers seront de plus en plus souvent réparés[18]. En juin 2024, l’UE a adopté une nouvelle directive sur le droit à la réparation des biens, qui confie aux fabricants la responsabilité d’effectuer des réparations rapides et économiques. Les nouvelles règles visent à faire disparaître « l’obsolescence programmée » et à garantir un approvisionnement régulier en pièces détachées, afin que les consommateurs puissent choisir de réparer leurs dispositifs défectueux plutôt que de s’en débarrasser.
Les fabricants d’autres produits non alimentaires seront également tenus, à la même date, d’emballer leurs produits dans des matériaux largement recyclés ou biodégradables. Cependant, des investissements ambitieux seront nécessaires pour aider les industries à répondre à ces exigences strictes, jusqu’à 100 millions USD selon certaines estimations[19].
L’impact du secteur des plastiques est évident chaque fois que vous marchez le long d’une plage et que vous tressaillez devant les détritus rejetés tous les jours par les marées. Plus de 240 gouvernements et entreprises se sont inscrits à la Coalition des entreprises pour un traité mondial sur les plastiques en 2022, afin de contribuer à rationaliser la gestion des déchets et à réduire l’excès de plastique dans l’environnement. Le traité comprend une stratégie à trois volets : Éliminer tout plastique superflu des produits ; garantir que les plastiques fabriqués sont réutilisables ou compostables ; et veiller à ce que les matières plastiques restent en circulation plutôt que de se retrouver dans les décharges. À terme, l’industrie espère obtenir des résultats rapides d’ici 2040 : Réduire de 80 % le volume de plastique déversé dans nos océans, diminuer de 25 % les émissions de gaz à effet de serre et créer 700 000 nouveaux emplois[20].
Le secteur agricole pourrait être l’un des plus rapides à répondre à l’attrait de l’économie circulaire, les avantages financiers étant évidents dans son cas. Une étude a montré que les champs de culture gérés de façon à favoriser la « régénération » (en utilisant la rotation des cultures, les pollinisateurs naturels et les produits recyclables comme le fumier et le foin) étaient 78 % plus rentables que les champs gérés de façon conventionnelle[21]. Les vastes monocultures, qui dépendent d’un travail du sol, d’engrais et de pesticides coûteux, nécessitent davantage d’interventions que les champs conçus en fonction de la santé des sols et de la biodiversité – et les interventions, que ce soit en termes de main-d’œuvre, de machines ou de produits chimiques, coûtent toujours de l’argent.
Les producteurs de batteries jouent un rôle déterminant dans la transition vers l’abandon des combustibles fossiles, à l’heure où le monde s’interroge sur la manière de stocker les réserves d’énergie variables provenant de sources renouvelables. L’industrie des batteries – responsable de 180 000 tonnes de déchets dangereux par an rien que pour les États-Unis[22] – peut appréhender la circularité sous deux angles. Premièrement, les batteries redondantes peuvent être collectées auprès des consommateurs et leurs composants (dont les éléments de terres rares comme le lithium) récupérés pour être réutilisés dans d’autres batteries. Deuxièmement, le concept fondamental de « propriété » pourrait être reconsidéré grâce à des modèles commerciaux circulaires comme les « Battery-as-a-Service » (batteries en tant que service : les clients achètent un véhicule électrique, mais louent sa batterie) ou « Mobility-as-a-Service » (la mobilité en tant que service : transports en commun, autopartage et covoiturage).
Le secteur de la construction doit également analyser attentivement son bilan environnemental. On espère toutefois que d’ici 2050, jusqu’à 80 % des processus de construction pourront être décarbonés grâce à l’adoption de trois stratégies circulaires :
- Les combustibles alternatifs : Remplacer les combustibles d’origine fossile par une combinaison de biogaz, de biomasse, de gaz naturel liquéfié, d’hydrogène ou d’ammoniac.
- Le durcissement du carbone : Utiliser le dioxyde de carbone pour renforcer le béton, ce qui rend le matériau plus durable tout en réduisant les émissions.
- Recarbonation/capture et stockage du carbone: Permettre au béton hydraté de réabsorber le carbone généré lors de sa propre production, ce qui permet de verrouiller définitivement les polluants.
Pour promouvoir pleinement la cause circulaire, nous devons également nous concentrer sur l’allongement du cycle de vie des différents produits desquels notre société est devenue dépendante.
Les fabricants peuvent commencer par concevoir des produits modulaires faciles à démonter ou à remplacer partiellement, composant par composant, sans sacrifier l’unité entière. Des emballages devraient être fournis, idéalement avec des étiquettes de pré-paiement, afin d’encourager le retour des matériaux aux usines. Une fois que le fabricant a reçu l’article défectueux ou obsolète, il peut choisir entre la réparation, la remise à neuf ou la refabrication (toutes ces options conduisant à la revente) ou le recyclage en fin de vie. Les éléments de cette chaîne de valeur devraient prospérer dans un avenir proche, avec une croissance annuelle moyenne de 15 % pour les seules remises à neuf d’appareils électroniques[23].
Les avantages de l’économie circulaire sont à portée de main et peuvent être considérables. L’exploitation des opportunités circulaires dans toute l’Europe, par exemple, pourrait permettre de réduire de 56 % les émissions des secteurs de l’acier, du plastique, de l’aluminium et du ciment d’ici 2050[24].
Mais notre périple vers cette terre promise se fera-t-il sans encombre, et quelles mesures devrions-nous prendre pour nous préparer à l’économie circulaire ?
Des défis nous attendent sur la voie d’un avenir circulaire
Peu de doutes subsistent quant à la pertinence et aux avantages potentiels de l’économie circulaire. Mais cela ne signifie pas que son évolution continue soit garantie.
Contrairement, disons, au passage des voitures à moteur à combustion interne (MCI) aux véhicules électriques (VE), la notion d’économie circulaire chevauche plusieurs secteurs. Ses effets et les pressions qu’elle exerce seront différents dans chaque cas, ce qui rend la planification de son adoption à grande échelle – en d’autres termes, la quantification de la chaîne de valeur et la coordination des stratégies – particulièrement difficile.
La nature diffuse de l’économie circulaire explique peut-être pourquoi elle n’a pas de promoteurs sectoriels et risque d’être reléguée au second plan dans les politiques nationales en matière de climat. La question se pose également de savoir qui paie les dépenses liées au rappel, à la remise en état et à la redistribution des articles : le client ou le fabricant ? Dans le second cas de figure, les dépenses sont de toute façon susceptibles de se répercuter sur les prix.
Les bonnes intentions sont une chose, mais les efforts peuvent se voir sapés par le manque d’infrastructures opérationnelles. Malgré les avertissements sur les dangers des plastiques, près d’un tiers d’entre eux se retrouvent encore dans les décharges. Les pays en développement, en particulier, doivent rapidement améliorer leurs systèmes de gestion des déchets, même si d’autres priorités se disputent la même enveloppe financière. Un rapport alarmant, mis en lumière par le Washington Post, prévoit qu’il y aura plus de plastique dans nos mers et océans (en termes de volume) que de poissons d’ici 2050[25].
Si nous voulons que les matériaux restent en circulation plus longtemps, nous devons développer davantage les technologies de recyclage. À l’heure actuelle, en raison des complications liées au mode de stérilisation et de catégorisation des plastiques usagés, chaque retraitement sacrifie la pureté du produit. Ainsi, seuls 2 % des plastiques usagés sont transformés en articles de qualité similaire[26] – la grande majorité du reste devient des produits de qualité inférieure, par exemple des fibres de moquette. Une meilleure technologie de recyclage permettra de conserver la pureté, mais à un coût plus élevé.
Si nous attendons des consommateurs qu’ils paient davantage, ils doivent être informés des avantages de l’économie circulaire. Parfois, des sanctions s’avèrent nécessaires en cas de non-respect des règles. Au Royaume-Uni, les magasins ont été contraints, à partir de 2014, de faire payer les sacs de caisse neufs, une mesure qui a permis de réduire la demande de 98 % dans les années qui ont suivi[27].
Pour certains secteurs, le passage à la circularité est une progression naturelle ; pour d’autres, les remaniements nécessaires sont plus profonds. L’industrie de la mode, par exemple, a été conçue autour d’un modèle de roulement rapide. Les vêtements étant fragiles, personnels et souvent bon marché, des innovations audacieuses seront nécessaires pour rendre les modèles commerciaux concurrents – la location ou la revente, par exemple – économiquement viables. Pour l’instant, nous sommes embourbés dans un système où nous achetons collectivement quelque 80 milliards de nouveaux vêtements par an, soit une augmentation massive de 400 % en vingt ans[28].
Face à ces défis, le temps presse pour les efforts mondiaux visant à accélérer le passage à une économie circulaire.
Des stratégies infaillibles pour combler le « fossé de la circularité »
Peu d’entre nous souhaitent vivre dans un monde où les cours d’eau sont pollués et l’air empoisonné, un monde entaché par des montagnes de déchets en décomposition et des montagnes d’ordures flottantes. Il existe plusieurs stratégies à mettre en œuvre dès maintenant pour promouvoir l’économie circulaire et favoriser un monde plus durable.
Tout d’abord, nous avons besoin de données. Beaucoup de données. Les parties prenantes des secteurs privé et public doivent comprendre les fissures de la chaîne de valeur à travers lesquelles les matériaux s’échappent régulièrement. Pourquoi un produit de valeur devient-il soudainement un fardeau ? Comprendre la question dans son ensemble est la seule façon de concevoir des mesures d’atténuation et d’évaluer les progrès accomplis.
Forts de ces données, nous pourrons commencer à développer l’économie circulaire et à partager les meilleures pratiques entre les pays, les villes et les entreprises privées. Des initiatives telles que la Circular Economy Indicators Coalition et le WEF Stakeholder Capitalism Framework s’efforcent d’améliorer les mesures et de normaliser les principaux indicateurs de transition.
Ensuite, nous devons passer de l’intention à l’action. Cela signifie qu’il faut procéder à des changements significatifs secteur par secteur.
L’industrie alimentaire, par exemple, doit encourager le passage à des régimes alimentaires sains pour la planète et pour les individus. Elle doit également investir dans l’agriculture régénératrice, mieux comprendre les raisons de la perte et du gaspillage alimentaires, et faire en sorte que les excédents alimentaires et les sous-produits soient facilement accessibles aux marchés secondaires.
Les fabricants de biens d’équipement (machines lourdes, meubles, véhicules, etc.) peuvent avoir un impact immédiat en adoptant des offres « As-a-Service » plutôt que d’encourager les achats directs. Ils peuvent également s’efforcer d’établir des chaînes d’approvisionnement inversées efficaces et rentables, investir stratégiquement dans des installations de remise à neuf et exploiter les nouvelles technologies numériques pour permettre le suivi et l’optimisation tout au long de la durée de vie d’un bien.
L’industrie du plastique, quant à elle, doit identifier les formulations les plus nocives pour l’environnement et les remplacer de toute urgence par des substituts moins dangereux. Elle peut également concevoir des produits en vue de leur réutilisation et de leur recyclage, s’attaquer aux problèmes d’hygiène liés aux plastiques de deuxième génération utilisés pour le stockage des aliments, mettre en place des systèmes de collecte des plastiques respectueux des consommateurs et aider les économies émergentes à mettre en place leurs propres installations de recyclage.
Le secteur de l’électronique doit avoir d’autres priorités : Apporter un soutien technique plus poussé pour accroître la longévité des produits ; veiller à ce que davantage de produits puissent être mis à niveau, au lieu d’être simplement remplacés ; améliorer l’accès aux composants recyclés pour réduire la demande de matières premières ; introduire de nouveaux modèles commerciaux, tels que le leasing, le partage et les abonnements ; et augmenter les incitations à l’investissement dans les technologies de recyclage.
Quant à l’industrie textile, elle doit se lancer dans la fabrication de vêtements conçus pour durer, en optant pour des tissus de meilleure qualité et des modèles intemporels qui ne risquent pas de se démoder. Elle doit également promouvoir les principes de l’agriculture durable dans la culture du coton, évaluer les ramifications commerciales d’un modèle de location de vêtements axé sur la réparation, mettre en place un commerce dynamique de textiles usagés et améliorer les installations de collecte et de tri.
Toutes ces tactiques se justifient d’un point de vue financier à long terme. Ensemble, elles peuvent nous aider à combler le désolant « fossé de la circularité » – statistique accablante selon laquelle, sur les 100 milliards de tonnes de nouveaux matériaux qui entrent en circulation chaque année, plus de 91 % disparaissent rapidement de l’économie, et ce, à tout jamais[29].
L’économie circulaire porte en elle la promesse d’un monde plus sobre, plus propre et plus écologique, à condition que nous commencions à traiter la planète Terre comme une biosphère précieuse et fragile, plutôt que comme une ressource inépuisable à exploiter.
[1] https://www.mckinsey.com/featured-insights/mckinsey-explainers/what-is-circularity
[2] https://www.genevaenvironmentnetwork.org/events/international-e-waste-day-2024/
[3] https://www.theworldcounts.com/challenges/planet-earth/waste/hazardous-waste-statistics
[4] https://constructiondigital.com/construction-projects/the-state-of-waste-management-in-the-construction-industry
[5] https://www.bbc.com/future/article/20211215-the-buildings-made-from-rubbish
[6] https://www.theworldcounts.com/challenges/planet-earth/state-of-the-planet/world-waste-facts
[7] https://www.ifc.org/en/blogs/2024/the-world-has-a-waste-problem
[8] https://www.mckinsey.com/featured-insights/mckinsey-explainers/what-is-circularity
[9] https://resortecs.com/circular-economy-forecast-a-billion-dollar-market-opportunity/
[10] https://www.db.com/what-next/responsible-growth/Circular-Economy–Kreislaufwirtschaft/Facts-Fakten/index
[11] https://resortecs.com/circular-economy-forecast-a-billion-dollar-market-opportunity/
[12] https://www.mckinsey.com/featured-insights/mckinsey-explainers/what-is-circularity
[13] https://www.unep.org/explore-topics/resource-efficiency/what-we-do/cities/solid-waste-management
[14] https://www.catf.us/2022/09/how-our-trash-contributes-to-climate-change/
[15] https://www.ellenmacarthurfoundation.org/articles/unlocking-the-value-of-the-circular-economy
[16] https://earth.org/statistics-about-fast-fashion-waste
[17] https://www.mckinsey.com/featured-insights/mckinsey-explainers/what-is-circularity
[18] https://www.who.int/news-room/fact-sheets/detail/electronic-waste-(e-waste) https://www.who.int/news-room/fact-sheets/detail/electronic-waste-(e-waste)
[19] https://www.mckinsey.com/featured-insights/mckinsey-explainers/what-is-circularity https://www.mckinsey.com/featured-insights/mckinsey-explainers/what-is-circularity
[20] https://www.ellenmacarthurfoundation.org/articles/unlocking-the-value-of-the-circular-economy https://www.ellenmacarthurfoundation.org/articles/unlocking-the-value-of-the-circular-economy
[21] https://peerj.com/articles/4428/ https://peerj.com/articles/4428/
[22] https://healtheplanet.com/100-ways-to-heal-the-planet/batteries
[23] https://www.mckinsey.com/featured-insights/mckinsey-explainers/what-is-circularity
[24] https://www.mckinsey.com/capabilities/sustainability/our-insights/how-a-materials-transition-can-support-the-net-zero-agenda
[25] https://www.washingtonpost.com/news/morning-mix/wp/2016/01/20/by-2050-there-will-be-more-plastic-than-fish-in-the-worlds-oceans-study-says/
[26] https://www.wri.org/insights/barriers-circular-economy-5-reasons-world-wastes-so-much-stuff-and-why-its-not-just
[27] https://www.gov.uk/government/news/plastic-bag-use-falls-by-more-than-98-after-charge-introduction
[28] https://earth.org/fast-fashions-detrimental-effect-on-the-environment/
[29] https://www.circularity-gap.world/2022